Où sont passés les 450 milliards issus de l’émission obligataire «Gabon 2023», devra désormais se demander le contribuable gabonais en plus d’attendre des explications sur les détournements des fonds des fêtes de l’indépendance tournantes.

Décembre 2013, le Gabon place, au terme de Road shows à travers l’Europe et les États-Unis, un Eurobond de 1,5 milliards de dollars US (750 milliards de francs CFA). © howitcouldbedifferent.org
Décembre 2013, le Gabon place, au terme de Road shows à travers l’Europe et les États-Unis, un Eurobond de 1,5 milliards de dollars US (750 milliards de francs CFA). © howitcouldbedifferent.org

 

Le débat a agité les Gabonais moyen tout le week-end écoulé durant. L’emprunt obligataire «Gabon 2023» a-t-il été détourné ? A-t-il servi à l’enrichissement de certains ténors du régime ? Pourquoi de nombreux projets marquent le pas alors que le gouvernement avait assuré que cet emprunt obligataire avait, entre autres, pour objectif de contribuer au financement de leur mise en œuvre ?

On ne tranchera pas la question ici, mais une chose est sûre : le débat est lancé. Et pour cause : au grand étonnement de ceux qui avaient fait le déplacement de sa permanence politique, l’ancien Premier ministre, Jean Eyéghé Ndong, a lancé, le 29 août dernier : «Des initiés des milieux financiers se souviennent qu’en 2013, le Gabon a contracté un emprunt obligataire sur le marché international pour un montant de 750 milliards de francs», poursuivant : «Une partie de cette somme a servi au paiement des échéances du précédent emprunt, celui de 2007, le reste, soit 450 milliards de francs a été versé sur un compte ouvert à la Banque centrale», avant de révéler : «Cet argent qui devait financer le budget 2013, puisque l’emprunt obligataire était inscrit au titre des ressources budgétaires, n’a jamais été mis à la disposition du Trésor pour le paiement des dépenses du budget». Et de s’interroger : «Quelle en est l’explication». Offensif à souhait, celui qui est également vice-président de l’Union nationale demande à «ceux qui dirigent l’Etat» d’apporter des éclaircissements à ces questions.

En effet, l’on se souvient effectivement que le 5 décembre 2013, l’État gabonais avait placé avec succès, à New York, son émission obligataire dénommée «Gabon 2023» d’un montant global de 750 milliards de francs sur les marchés financiers internationaux, avec un coupon de 6,375 % de taux d’intérêt pour une maturité de 10 ans. Cette opération financière visait à réduire, à un niveau marginal, l’encours de l’émission obligataire de 2007 et d’accélérer la réalisation des grands projets arrêtés dans le Plan stratégique Gabon émergent (PSGE). «L’Etat entend assurer le financement de ses investissements structurants contenus dans le Schéma national d’infrastructures, particulièrement dans le domaine de la modernisation des aéroports, du développement de la capacité de production énergétique, des infrastructures de télécommunication et d’autres secteurs de soutien à la production», avait, d’ailleurs, claironné Luc Oyoubi, alors ministre de l’Economie, de l’Emploi et du Développement durable.

8 mois plus tard, la Stratégie d’investissement humain a supplanté le Schéma national d’infrastructures dans les discours officiels, le projet de marina «Champ triomphal» est à l’arrêt, la construction des barrages hydroélectriques sur l’Okano et les chutes de l’impératrice Eugénie est l’objet de polémiques entre l’entreprise adjudicataire des marchés et l’Etat, l’accès à l’eau potable est toujours problématique à Libreville alors que les 3000 km de fibre optique devant faire du Gabon un «hub numérique» sont tombés aux oubliettes. Et si l’aéroport de Port-Gentil est en cours d’agrandissement, c’est essentiellement grâce à un financement du pétrolier Total-Gabon. Pendant, ce temps, des tensions de trésorerie se font sentir tous les jours au niveau de l’Etat. Autant de réalités qui soulèvent une question-clé : qu’est devenu l’emprunt obligataire «Gabon 2023» ?

Source : Loic Ntoutoume - Gabonreview.com