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25 juin 2010

Afrique,Gouvernance : Comment la traque des avoirs volés en Afrique s’organise

Afrique,Gouvernance : Comment la traque des avoirs volés en Afrique s’organise

Les Nations unies, les Etats-Unis, la Suisse et la Banque mondiale se sont mis ensemble pour traquer les fonds illégaux volés à l'Afrique par nombre de fonctionnaires et de décideurs. Ces sommes inondent les places financières internationales et les paradis fiscaux.

Ils ne connaissent des secousses depuis que la Convention des Nations unies contre la corruption est entrée en vigueur dans certains Etats européens et américains, au grand bonheur des populations meurtries du continent. Malgré l’armada d’avocats déployés par les banques pour confisquer les actifs africains.

Du 15 au 18 juin 2010, les Etats-Unis organisent à Yaoundé, un séminaire régional sur la lutte contre la corruption en Afrique sous la férule du département américain de la Justice. Experts judiciaires, administratifs, procureurs et associations de la société civile d’une dizaine de pays, se mettent ensemble pour réfléchir sur les mécanismes et les outils à déployer pour sécher les robinets de la corruption.

Si la lutte contre la corruption devient un générique selon plusieurs experts présents à cette rencontre, c’est le recouvrement et la récupération des avoirs volés sur le continent, à travers le monde qui constitue l’essentiel des travaux de ce conclave. «A quoi sert-il de lutter contre la corruption si au final ça ne rapporte pas l’argent ? Le but de la lutte contre la corruption consiste à faire gagner de l’argent au pays. Il est question de réfléchir sur les moyens à mettre en œuvre pour ramener cet argent aux pays bénéficiaires», explique Mamy Raboana, conseiller technique au projet Choc (Changer de mentalités, s’opposer à la corruption).

Blocages

Une semaine auparavant, notamment les 8 et 9 juin 2010, la Suisse, la Banque mondiale et les Nations unies organisaient à Paris un forum international sur le recouvrement et la récupération des avoirs volés en Afrique et placés dans ce pays. Au cours de ce conclave qui a permis de mette en évidence des exemples de prédation, la Banque mondiale révèle que «les fonds volés à leur propre pays par les dictateurs et leurs complices représentent entre 20 et 40 milliards de dollars par an». Selon John Christensen, conseiller fiscal britannique, ces sommes, depuis environ 10 ans, représentent 274 milliards de dollars, soit 137 000 milliards de Fcfa.

Sur les chiffres de la ponction opérée de manière globale sur les économies des pays en développement, Michel Camdessus, ancien directeur général du Fmi indique que la saignée est massive et représente 1000 milliards de dollars, soit 500 000 milliards de Fcfa. Ce qui fait dire à un fonctionnaire de la banque mondiale qu’ «avec 100 millions de dollars par exemple, on peut traiter 600 000 malades du sida ou raccorder 250 000 ménages à l’eau potable».

A Yaoundé comme à Paris, les organisateurs s’accordent tous sur la difficulté de produire des preuves attestant de l’origine criminelle des fonds querellés. «Il faut prouver l’origine criminelle des fonds. Cela suppose que les pays victimes prennent des initiatives et que les centres financiers se montrent coopératifs. Dans les deux cas, cela ne va pas de soi», expliquait Jean Pesme, manager intégrité des marchés financiers à la Banque mondiale lors du forum de Paris.

Ainsi, comme l’indique un diplomate de l’ambassade des Etats-Unis à Yaoundé, outre cette preuve, les Etats doivent identifier la destination exacte de l’argent et les banques qui logent les fonds. «Les autorités camerounaises nous envoient souvent des listes de personnalités sur qui pèsent des soupçons de détournement de fonds, sans indiquer exactement ce qu’elles ont piqué, le nom de la banque ou encore la ville où est située celle-ci. Ce n’est pas à nous de faire ce travail à leur place si elles veulent rentrer en possession de ces avoirs placés aux Etats-Unis», souligne Jim Lord, procureur à Seattle aux Etats-Unis.

D’après le procureur, il est difficile pour le Cameroun de rentrer en possession des avoirs volés à cause du mauvais ficelage des dossiers et des lourdeurs observées dans les procédures judiciaires des mis en cause dans les affaires de corruption. «Tant que la justice ne condamne pas les personnalités encore en détention provisoire, aucune action n’est possible», indique un responsable de l’ambassade des Etats-Unis.

Au ministère de la Justice, les actions initiées jusqu’ici pour tracer l’argent volé se sont heurtées à l’absence de convention entre les Etats-Unis et le Cameroun. «Les Américains nous ont dit qu’en l’absence d’un accord entre les deux pays, on pouvait utiliser la convention des Nations unies contre la corruption pour traquer cet argent ; ils nous ont aussi indiqués les indices à fournir et la procédure à suivre pour vérifier que l’argent volé au Cameroun se trouve exactement dans leur pays», indique Mathias Dinga Nyoh de la division de la coopération judiciaire du ministère de la Justice.

D’après lui, le manque de moyens financiers, logistiques et d’informations sur l’identité et la localisation des comptes pénalise cette mission. Les lenteurs judiciaires et le rallongement des procès, sont aussi autant de difficultés, reconnaît le magistrat, qui rendent complexes l’aboutissement d’une procédure de rapatriement d’avoirs volés.

Succès

«Les Etats-Unis sont un pays vaste avec des lois différentes et des milliers d’établissements bancaires. Il est difficile d’engager des actions contre les banques dont on ne connaît pas la localisation, et surtout si les personnes dont les noms nous sont communiqués y ont des comptes», précise Jim Lord. Malgré le sacro-saint secret bancaire, les artifices juridiques et l’habileté des familles qui compliquent la saisie des fonds, certains pays comme le Nigeria et le Mali ont réussi à retrouver et à récupérer tout ou partie des avoirs volés dans ces pays.

Après une bataille juridique de trois ans, en vertu d’un accord amiable entre le gouvernement nigérian et la Confédération suisse, 505 millions de dollars furent rapatriés dans ce pays sur les 2,2 milliards de dollars dont le président Sani Abacha était accusé d’avoir détournés. Mme Ngozi Okonjo-Iweala, directrice générale du groupe de la Banque mondiale et ancienne ministre des Finances du Nigeria, s’est étendue lors du forum de Paris, sur les méthodes utilisées par le feu président Abacha.

«Il procédait de deux façons : soit il faisait gonfler les marchés publics pour s’approprier la différence, soit il allait directement se servir à la banque centrale de mon pays. Avec son fils et ses amis, il faisait ensuite circuler cet argent au Kenya et à Londres, puis en Suisse pour brouiller les pistes», rapporte-t-elle dans le quotidien français Le Monde. Après six ans de débat juridique et de blocages administratifs, les cantons suisses de Vaud, Neuchâtel, Zurich et Genève, concernés par les détournements orchestrés par l’ex-président malien Moussa Traoré, décident de reverser la somme de 2,4 milliards de dollars saisis dans différents comptes à l’Etat malien.

D’après Valentin Zellweger, chef de la division Droit international public au Département fédéral suisse des Affaires étrangères, au cours des 15 dernières années, la Suisse qui abrite plus 800 milliards de dollars d’avoirs illégaux dont 250 proviennent des pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique, a restitué aux Etats concernés plus de 1,7 milliard de francs, soit plus de 800 milliards de Fcfa.

Auteur: Pierre Célestin Atangana

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